Comment le sol sculpte-t-il l’acidité naturelle ? Un jeu complexe d’eau, de nutriments et de stress végétal
Disponibilité en eau : clé de la conservation de l’acide malique
Dans les années sèches, les sols peu profonds, très drainants, tels que les caillottes, favorisent le stress hydrique. Ce stress, curieusement, préserve davantage l’acidité, puisque la plante ralentit son métabolisme ; le raisin « grille » moins vite ses acides organiques. À l’inverse, sur les parcelles de terres blanches, l’argile retient l’eau plus longtemps, prolonge la maturation et nécessite parfois une surveillance accrue pour vendanger à l’optimum d’équilibre acidité/sucre.
Quelques chiffres pour illustrer : lors de l’été caniculaire de 2022, le taux d’acide malique mesuré sur les raisins des caillottes était de 1,7 g/L à maturation, contre 1,2 g/L sur terres blanches (source : synthèse millésime 2022, SICAVAC Centre).
Teneur en calcaire actif et pH des moûts
Le calcaire, très présent dans les caillottes, agit comme un régulateur naturel du pH. Des recherches menées à l’INRA Dijon (paru dans “Terroir and acidity in Sauvignon blanc”, 2018) ont montré que des sols à plus de 30 % de calcaire actif présentent systématiquement des moûts à pH plus bas (autour de 3,10-3,20 pour le sauvignon), donc une perception d’acidité plus marquée. Sur silex, le pH est légèrement supérieur (3,25-3,35), mais toujours dans le registre de la fraîcheur.
Microbiologie des sols : acteurs invisibles, impacts sensibles
On évoque rarement le rôle du vivant dans le sol, et pourtant, à Verdigny comme ailleurs, la diversité microbienne (champignons, bactéries, levures indigènes) module la minéralisation des éléments, influe sur la disponibilité du potassium (qui agit comme un tampon du pH), et participe donc au profil d’acidité final. Certaines pratiques, comme l’absence de désherbage chimique dans les rangs (adoptée sur environ 45 % des surfaces de Verdigny en 2021 – Réseau DEPHY) favorisent une plus grande diversité microbiologique et, selon plusieurs études en Bourgogne (notamment celle de J.L. Charlier, 2020), peuvent aboutir à des moûts légèrement plus acides – tout en offrant plus de complexité aromatique.
Le silex : un cas particulier, entre minéralité et tension
Si la “minéralité” des vins est difficile à quantifier, sur silex, les viticulteurs de Verdigny observent souvent une acidité perçue comme plus verticale, parfois moins large mais plus pénétrante. Dans une dégustation comparative menée par la Revue du Vin de France en 2019, les cuvées issues de silex affichaient des acidités totales comprises entre 4,4 et 5,7 g/L (acide tartrique), contre 4 à 5 sur terroirs calcaires, avec, en bouche, des sensations tactiles plus serrées et une longueur accentuée.
- Sur silex, les maturités sont souvent atteintes avec des niveaux d’acidité élevés (malique + tartrique), ce qui confère un potentiel de garde intéressant au vin, un critère fondamental pour les amateurs de Sancerre de terroir.